Jean de Bengy
Texte de Jean de Bengy
Inspecteur général de la création et des enseignements artistiques,
ministère de la culture et de la communication
« L’œuvre d’Alain Husson-Dumoutier est œuvre d’atelier, au sens habituel du terme, et pourtant elle n’est œuvre d’artiste pour qui l’atelier clôt un monde, le sien et celui de ses travaux ; il est artiste dans le siècle car il pour-suit d’autres objectifs, mène d’autres actions, à travers une symbiose, où l’art reste la dominante incontestée.
Artiste complet dans la mesure où il a exploré, grâce à techniques et manières, matériaux et méthodes, ces évolutions complexes qui, dans la continuité de la tâche accomplie, les présences du doute, les fluidités des réussites, les lourdeurs des échecs, la jouissance du possible, fondent une œuvre.
Parvenu à extraire l’essentiel, arrivé beaucoup plus loin que ce qui est appelé, un peu schématiquement, la maturité, étant parvenu à cette connaissance, rassemblant savoir intellectuel, savoir artistique et savoir-faire, il est entré dans le rêve de tout artiste qui, ayant réalisé une œuvre, parvient à l’œuvre.
Celle qui se suffit à elle-même, tout en ne pouvant exister que par ce qui la précède, celle qui pourrait clore et se trouve à l’opposé d’une fin car elle est autant ouverture vers un devenir que retour sur ce qui fut.
Ayant la certitude de pouvoir atteindre ce but, sachant que le moment était venu, Alain Husson-Dumoutier a choisi le plus austère et le plus périlleux des sujets, ces écritures dites saintes ou sacrées, la Bible, les Evangiles, le Coran.
La foi en ses variantes ou en ses absences, donne à ces écrits une texture différente, ils peuvent ou non déterminer les actes de la vie, fixer les modes de pensée, ils peuvent aussi n’être que lignes aux somptueuses beautés littéraires. Pourtant jamais mots ne marquèrent à ce point le destin des hommes, ils sont, et à eux seuls, une partie essentielle de notre histoire et une force déterminante de notre avenir.
Il fallait aussi une autre approche, celle d’une peinture qui tout en s’insérant dans l’histoire de l’abstraction en modifie profondément les données ; à travers les logiques de l’abstraction se définissent assez facilement les apparentements et les oppositions, les rapprochements et les ruptures ; il est d’exercice courant que de placer chaque artiste au cœur de la filiation qui semble être la sienne. Pourtant Alain Husson-Dumoutier ne se laisse soumettre à ce jeu, n’entre pas plus, à l’évidence, dans l’abstraction géométrique que dans l’abstraction lyrique. »